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Le sac de Manue
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20 avril 2008

MR 73

Difficile de raconter l'histoire de ce film sans la rendre froide et pauvre, tandis que le film lui-même est profondément humain, donc complexe.

Schneider est un flic torturé qui vit sa vie avec ses souffrances et ses fantômes, les traînant sur les épaules comme on porte un fardeau, tout en s'obligeant à avancer pour ne pas s'effondrer et mourir sur place. Il plonge ses douleurs dans une bouteille d'alcool comme on trempe un cadavre dans un tonneau de formol. Il est infiniment seul, dans un environnement sombre et glacial qui agit pour la justice. Il peut s'écrouler d'une minute à l'autre, il est sur un fil, constamment prêt à sombrer dans la folie et la violence, à se faire justice lui même comme une saignée libératrice. Et pendant ce temps, un tueur en série répand le sang et la rage autour de lui, s'en prenant à des femmes qu'il défigure, humilie et qui nous entraîne au fond, tout au fond de l'horreur humaine. Incompréhensible, inimaginable, écoeurante, au point que l'on n'est pas triste, on est mal. 

Un jour, Justine vient à la rencontre de Schneider. Une deuxième rencontre. Vingt ans après un drame tout aussi macabre que celui qui agite la ville aujourd'hui. Ses parents ont été massacrés, elle a vu le tueur qu'elle croyait puni pour la vie mais qui vient d'être libéré pour bonne conduite, Schneider était là aussi lorsque les yeux de cette petite fille se sont posés sur lui après l'horreur. Le haut-le-coeur que l'on éprouve depuis le début devient encore plus fort. Comment un homme capable d'aller aussi loin dans la violence et l'inhumanité peut-il être remercié pour bonne conduite? Comment la justice peut-elle adoucir la peine d'un meurtrier lorsque les victimes portent leur souffrance comme un tatouage gravé dans la peau pour le reste de leur vie?

Ce film est une deuxième chance pour ceux qui souffrent, un appel à la lutte, mais aussi à la compréhension. Il n'y a pas de conte de fées, la vie n'oblige pas ceux qui ont été meurtris dans leur chair à se relever ni à faire preuve d'humanité. Les discours sont vains, chacun s'arrange avec sa vie, on ne peut pas juger. Dans tous les sens du terme. La justice est-elle assez forte? Et pourtant, il n'y a pas d'autre choix que de lui faire un peu confiance.

Ce film est somptueux, il est un coup de feu dans nos principes, un rappel qu'il est facile de demander aux gens de tourner les pages les plus sombres de leur vie, mais que la force qui nous habite est peut-être capable du meilleur, elle n'est pas toujours capable de nous sortir indéfiniment de la peine.

Olivier Marchal signe là un vrai chef-d'oeuvre.

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Le sac de Manue
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